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Décidément, la guerre globale de l’Occident contre le terrorisme a démarré l’année 2015 sur les chapeaux de roues. Des événements surmédiatisés, aux circonstances dénoncées comme « inexpliquées et inexplicables », ont commencé le 7 janvier avec les attentats de Charlie Hebdo à Paris.
Onze jours plus tard, Albert Nisman, le procureur général argentin chargé de l’affaire des attentats terroristes à la bombe de l’AMIA (Association mutuelle israélite argentine) à Buenos Aires a été retrouvé mort, juste au moment où il devait révéler publiquement des « preuves irréfutables » contre la présidente argentine Cristina Kirchner et son ministre des Affaires étrangères, Héctor Timerman, pour avoir prétendument caché le rôle de l’Iran dans les attentats.
Espion contre espion contre espion
Le bâtiment qui a explosé abritait – auparavant comme aujourd’hui – non seulement l’association AMIA, mais aussi la DAIA (Délégation des associations israélites argentines), le puissant lobby juif local travaillant pour Israël.
Plus de vingt-et-un ans après, cet événement est devenu l’affaire la plus chargée en corruption de toute l’Argentine, où l’ingérence obscène du Mossad, ainsi que du FBI et de la CIA, consiste entre autres à semer de fausses preuves sur une voiture piégée inexistante, occultant d’autres pistes bien plus probables, et à verser des commissions occultes à de faux témoins afin d’incriminer injustement le Hezbollah, soit via la Syrie dans un premier temps, soit via l’Iran depuis 2006.
Les médias mainstream – locaux comme internationaux – ont mené l’opinion publique à la confusion programmée, grâce à des mensonges éhontés et au grand huit émotionnel sur un événement qui tua 85 civils. Les véritables acteurs, dissimulés dans les coulisses, ont été cependant soigneusement protégés.
L’un de ces acteurs principaux est un puissant agent des services de renseignement argentin nommé Jaime Stiusso, qui a systématiquement fait la promotion des versions américaine et israélienne des faits, amenant l’Argentine à accuser injustement l’Iran de ce crime épouvantable. En comptant sur le soutien et la protection totale de la CIA, du Mossad, et du MI6, M. Stiusso est devenu le mentor du procureur général Nisman qui, dès lors qu’il fut chargé de l’enquête en 2004, accusa systématiquement et bruyamment l’Iran.
Le mythe du « c’est l’Iran qui l’a fait » passa la vitesse supérieure sous l’administration George W. Bush, dans le cadre de sa stratégie d’envahissement généralisé du Moyen-Orient après le 11 Septembre, et surtout après juillet 2006, quand l’invasion israélienne et les bombardements du Liban et du Hezbollah ont conduit Israël à la déroute (une division entière de chars israéliens fut décimée par les forces du Hezbollah de M. Nasrallah, entraînées et armées par l’Iran).
Une connexion iranienne ?
À l’époque, seulement deux mois après l’incursion d’Israël au Liban, un meeting privé s’est tenu à l’hôtel Waldorf-Astoria de New York, entre le président argentin Néstor Kirchner, la première dame Cristina Kirchner (secrétaire nationale et future présidente), le ministre des Affaires étrangères Jorge Taiana, et de puissantes organisations juives, dont l’American Jewish Committee (le Comité des juifs américains), le World Jewish Congress (le Congrès juif mondial), la loge maçonnique juive B’nai B’rith et son bras armé, l’Anti-Defamation League (Ligue antidiffamation).
Un accord selon lequel l’Argentine accuse l’Iran des attentats contre l’AMIA fut conclu, ce qui mena M. Kirchner à envoyer immédiatement le procureur fédéral Alberto Nisman aux États-Unis afin de « rassembler les preuves nécessaires contre l’Iran » chez les agences de renseignement que sont la CIA et le Mossad, qui ont de toute évidence une dent contre ce pays.
Pour preuve de l’entière satisfaction des États-Unis et d’Israël à l’égard de l’Argentine, le directeur du Congrès juif mondial, le rabbin Israel Singer, a promptement exprimé sa satisfaction vis-à-vis de ces accusations de l’Argentine contre l’Iran, preuve que l’accord du Waldorf-Astoria a été mis à l’œuvre par l’administration Kirchner.
M. Nisman a immédiatement accusé l’ancien président iranien Hachemi Rafsandjani et ses principaux ministres d’avoir organisé les attaques contre l’AMIA. Cependant, il ne fut jamais à même de produire des preuves correctes et tenables.
Il a effectivement demandé à Interpol d’arrêter à Londres l’ambassadeur iranien en Argentine, M. Hami Soleimanpour. Mais son arrestation par les autorités britanniques fut rapidement interrompue, dans la mesure où M. Nisman n’a présenté aucune preuve justifiant ses accusations. Le gouvernement argentin fut même obligé de payer les 200 000 livres sterling de frais de tribunaux.
Quoi qu’il en soit, depuis ces dix dernières années, M. Nisman est devenu le chouchou des organismes juifs aux États-Unis, en Israël et en Europe, qu’il a régulièrement visités pour les informer des avancées de l’affaire AMIA/DAIA. En 2007, il est allé jusqu’à signaler cette affaire devant la Cour suprême… non pas d’Argentine, mais d’Israël.
M. Nisman devint très populaire et très présent dans les médias, mais il restait un problème : il ne pouvait tout simplement pas mettre sur pied une affaire sans preuves suffisantes contre l’Iran, et ce malgré l’inquiétude grandissante des néoconservateurs, comme la législatrice lobbyiste républicaine Ileana Ros-Lehtinen et les gouvernements d’ultra-droite successifs d’Israël.
L’affaire plongea encore plus profondément dans les abysses de la confusion quand, en janvier 2014, Yitzhak Aviram, ambassadeur israélien en Argentine durant les attentats de l’AMIA, s’est publiquement vanté que « les personnes ayant fait sauter les locaux de l’AMIA ont toutes été exécutées par nous (Israël) ». Israël l’a immédiatement fait taire.
M. Nisman continua d’accuser l’Iran avec le soutien de l’administration Kirchner, mais lorsque l’administration Obama arriva au pouvoir en 2009, les États-Unis commencèrent à avoir des doutes concernant la stratégie agressive néoconservatrice de Bush fils, qui consistait à « abattre l’Iran ».
Avec une situation en Irak se détériorant de manière dramatique, une résistance naissante venant de Russie et d’ailleurs contre les actions belliqueuses des États-Unis et du Royaume-Uni, l’Amérique est devenue plus modérée sur la question de l’Iran et il a été clairement expliqué à la présidente Cristina Kirchner, par « des canaux non-officiels et discrets », qu’il était peut-être temps pour elle d’aller discuter avec les Iraniens.
Ainsi, en 2013, l’Argentine annonça qu’elle « commencerait effectivement à discuter » avec les Iraniens – chose qui n’a pas été faite depuis presque sept ans – et un « protocole d’entente » a été signé, devenant loi locale en mars 2013. Dans le même cadre, une « commission pour la vérité » était en passe d’être établie (mais M. Nisman et ses marionnettistes de la CIA et du Mossad n’étaient-ils pas supposés avoir en leur possession « des preuves et la vérité pouvant condamner l’Iran » ?).
Les néoconservateurs des États-Unis et d’Israël en sont devenus fous de rage. En décembre dernier, ajoutant des insultes aux préjudices, la présidente Kirchner a viré les haut gradés de l’agence de renseignements locale SI, expulsant tout spécifiquement l’agent américano-britannico-israélien, Jaime Stiusso.
Nisman était supposé être en vacances pour visiter l’Europe avec sa fille de quinze ans durant tout le mois de juillet. Cependant, soudainement, en visitant Amsterdam, « quelqu’un là-bas » lui aurait ordonné de rentrer immédiatement en Argentine ; de manière tellement rapide qu’il aurait demandé à sa femme d’aller chercher sa fille à l’aéroport de Madrid, où il l’a déposée avant de s’envoler pour Buenos Aires.
Dès son arrivée, il sortit de son chapeau, comme par magie, un dossier de 350 pages accusant la présidente Kirchner et son ministre des Affaires étrangères (également juif) Héctor Timerman, de « couvrir » l’Iran. Il était sur le point de le présenter lors d’une session extraordinaire d’urgence au Congrès argentin, le lundi 19 janvier à 15 heures, mais il se peut qu’il ait réalisé que son affaire était morte-née et n’avait aucune chance de tenir.
Quoi qu’il en soit – hélas ! – il s’est (ou « quelqu’un » l’a) tué durant la matinée du dimanche 18 janvier. Une mort qui venait à propos.
L’affaire Nisman et le contre-interrogatoire qu’elle aurait entraîné auraient probablement ramené toute l’enquête de l’AMIA/DAIA à la case départ. Pour la seconde fois, comme cela s’est déjà passé en 2003 quand l’affaire d’une « connexion syrienne » s’est complètement écroulée (se traduisant par la poursuite de Juan Galeano), l’ancien juge fédéral instruisant l’affaire, et même l’ancien président de la DAIA – Rubén Baraja – ont fini en prison, ce dernier ayant corrompu un vendeur de voiture douteux, Carlos Telleldín, en lui donnant 400 000 dollars afin que l’on incrimine la police de Buenos Aires sur la base de fausses preuves, et que l’enquête se redirige vers une insaisissable « voiture piégée ».
Cette « voiture piégée » ne fut jamais retrouvée, mis à part un bout de métal provenant d’un moteur de van, « trouvé » par un agent du renseignement militaire israélien « aidant » à ramasser les débris du bâtiment de l’AMIA juste après les attentats à la bombe du 18 juillet 1994, sur lequel il y avait, « par chance », le numéro de série du véhicule.
Cela ne vous rappelle-t-il pas l’histoire du passeport intact de Mohammed Atta « retrouvé » dans les débris du World Trade Center ? Ou même celle du terroriste masqué de Charlie Hebdo qui a fait tomber sa carte d’identité à Paris il y a quelques semaines ?
Si l’affaire imparfaite de Nisman était révélée, la ruche serait à nouveau agitée et cela représenterait un danger pour les États-Unis, Israël et les lobbies juifs locaux et internationaux qui ont travaillé si dur pour tout mettre sur le dos de l’Iran. Une piste bien plus plausible devrait être examinée : celle d’une possible connexion israélienne.
Une connexion israélienne
Durant le début des années quatre-vingt-dix, des luttes sordides avaient lieu en interne au sujet de la Palestine et des colonies illégales d’Israël, entre la gauche israélienne, et la droite ultra-fondamentaliste et raciste montante.
Quand les quartiers généraux de l’AMIA/DAIA furent éventrés par une « voiture piégée » introuvable, Israël était gouverné par Yitzhak Rabin, du parti travailliste, qui cherchait honnêtement une solution de paix à deux États avec les Palestiniens. En juillet 1994, Rabin a même autorisé le leader de l’Organisation de libération de la Palestine, Yasser Arafat, à rentrer de son exil en Palestine, seulement dix-huit jours avant les attentats à la bombe de l’AMIA/DAIA. D’autres événements démontrant cette lutte intestine se sont produits à l’époque, mais le conflit atteignit son point culminant moins de dix-huit mois après les attentats de l’AMIA/DAIA, lorsque le Premier ministre Rabin, en novembre 1995, fut assassiné lors d’un rassemblement public en Israël.
Qui était l’assassin ? Un terroriste musulman ? Non. Un dingue néonazi ? Non plus. Le Premier ministre Rabin fut assassiné par un certain Yigal Amir, un jeune militant d’extrême droite israélien lié au Shin Beth (dont Rabin avait réduit les effectifs) et au mouvement des colons israéliens illégaux à l’intérieur d’Israël.
Pour Israël, le résultat politique se résume au fait que ceux qui promeuvent la paix n’arrivent jamais au pouvoir dans ce pays, et que Netanyahou, Sharon, Olmert, Barak, Lieberman, Livni, Feiglin et leurs amis dirigent Israël depuis.
Ainsi, les Palestiniens n’ont jamais obtenu leur État souverain. Au lieu de cela, ils ne reçoivent que les bombes d’Israël, l’humiliation, et font face au mur de huit mètres de haut et de huit cents kilomètres qu’Israël a bâti autour de leur pays.
Quand on a saisi cette toile de fond, la « logique » qui se cache derrière les attentas de l’AMIA/DAIA prend une toute autre dimension : celle d’une guerre interne où l’extrême droite israélienne, brisant la paix, envoie à la gauche « une offre qu’ils ne pourront pas refuser », probablement orchestrée par des groupes clandestins internes, ou même un quelconque acteur des opérations secrètes du Mossad, de la CIA, du MI6, de Blackwater ou autre.
À l’instar du parrain Don Corleone, ces auteurs mystérieux étaient informés convenablement afin de « faire en sorte à ce que cela ressemble à une voiture piégée mise en place par le Hezbollah sponsorisé par les Iraniens ». Cela n’a pas aussi bien marché qu’ils l’espéraient.
Le Nisman venait fouiner, avec certes un peu d’inquiétude, trop près de la ruche. Voilà ce qui l’a peut-être conduit à la mort – comme ce commissaire de police enquêtant sur l’affaire Charlie Hebdo qui a été retrouvé « suicidé » la nuit des événements ; ou cet électricien du métro de Londres, Jean Menezes, qui aurait pu « voir quelque chose » les jours précédents les attaques des transports publics de Londres en juillet 2005, et qui fut abattu « par erreur » par un policier londonien quelques jours plus tard.
La « guerre contre la terreur » est clairement de retour en Argentine, une fois de plus.
À l’heure où j’écris ces lignes, les puissants lobbies juifs locaux, la DAIA et l’AMIA, hurlent et pleurnichent en « craignant une troisième attaque terroriste contre les intérêts juifs en Argentine », et la « disparition inexpliquée » d’un missile antichar de l’armée argentine plus tôt ce mois-ci est parfaitement relayée par les médias.
L’US Center for Security Policy (Centre américain pour la politique de la sécurité) vient de publier un article dans le Washington Times appelant les États-Unis et l’Union européenne à imposer des « sanctions contre l’Argentine ».
Les élections présidentielles en Argentine se dérouleront plus tard cette année, et quasiment tous les candidats – les favoris étant Daniel Scioli, Mauricio Macri et Sergio Massa – suivent la ligne du politiquement correct, un fait des plus cohérents quand on considère le fait qu’ils visitent et font des rapports à l’« Americas Society » Rockefeller-Negroponte-William Rhodes, et qu’ils rendent souvent hommage au World Jewish Congress, à l’American Jewish Committee, à la DAIA, à l’AMIA et à d’autres lobbies juifs locaux et internationaux.
Enfin, voilà deux leçons pour madame Kirchner : 1°) quand des Israéliens d’extrême droite et des néoconservateurs se battent, ne vous placez pas entre leurs tirs, et si vous choisissez un camp, restez-y ; parce que : 2°) « Rome ne récompense pas les traîtres. »
AMIA, manque juste un "F"
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